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entières ; l’on réussissait si peu à rendre inaperçu le passage d’un caractère à l’autre, que l’on peut compter quelquefois, pour former une seule double croche, jusqu’à cinq ou six pièces distinctes.

L’art en était à ce point, et nous pouvons ajouter qu’à Paris même les moyens manquaient totalement pour citer dans le corps d’un ouvrage et imprimer d’une manière suffisamment nette un passage de musique, même le plus simple ; de là l’absence en ce genre de livres élémentaires, de publications à la portée de tous.

M. E. Duverger s’inquiéta de la difficulté. Après de longues méditations, il reconnut qu’on était arrivé à toute la perfection qu’on pouvait atteindre en suivant une fausse route. Le vice fondamental, dans l’impression de la musique, était cet assemblage de lignes d’une courte dimension qu’on ne pouvait réunir d’une manière imperceptible, sorte de portée en mosaïque, dont on comptait sans peine les élémens. C’est sur cet objet qu’il concentra ses réflexions, et l’on peut voir, par le spécimen que nous donnons, quelle importante réforme a été introduite à cet égard. Les notes ont toute l’élégance, et les portées toute la continuité de la gravure.

Cette ingénieuse découverte est surtout précieuse pour l’impression des ouvrages didactiques, car elle offre une notable économie. Déjà plusieurs publications[1] de ce genre sont sorties des presses de M. E. Duverger, et nous pensons que cette exécution, en permettant de publier beaucoup de livres sur la musique, contribuera à la populariser en France.


Dans un savant ouvrage sur les Colonies romaines qu’on regrette de ne pas voir publier, M. Dureau-Delamalle, traitant la question de l’esclavage sous le rapport de la production, évalue la perte annuelle en esclaves à Saint-Domingue, avant la révolution, à dix pour cent, et à douze dans les colonies à sucre anglaises et hollandaises des Antilles. Il est de fait que la culture du sucre, plus que toute autre, est meurtrière pour l’esclave. Or, nos colonies de la Martinique et de la Guadeloupe étant sucrières, il en résulterait que la proportion de douze pour cent peut leur être supposée, et qu’ainsi la vie moyenne de l’esclave aux Antilles serait d’environ huit ans. Cette induction ne suffit-elle pas pour faire prévoir la dépopulation prochaine, et la ruine inévitable de ces colonies déjà si languissantes ?


La Revue donnera, dans sa livraison du 15 janvier, la seconde partie des scènes historiques de M. Alex. Dumas, qui n’ont pu entrer dans celle du premier.


  1. Parmi ces ouvrages, nous citerons les Lettres à Clémence sur la musique.