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ÎLE DE CUBA.

Il nous reçut dans un grand salon. C’est un petit homme assez gros, quoique sans excès, avec une assez belle figure. Il parle très-bien français, et sa famille est de Pau. L’amiral me dit, après les premières politesses d’usage, qu’il avait connu mon père à la Corogne, et que, quoique simple lieutenant de vaisseau alors, il en avait reçu tant de marques de bienveillance, qu’il ne l’oublierait jamais, et qu’il se trouvait heureux de pouvoir faire quelque chose pour un de ses fils. Je profitai de ses offres de service pour lui demander à voir ses bâtimens, ce qu’il m’accorda avec beaucoup de grâce

Nous allâmes ensuite chez le gouverneur, où nous trouvâmes même affluence d’officiers à cannes dans l’antichambre. Le général Vivès est un petit homme à cheveux gris, qui est loin d’avoir l’air franc et cordial de l’amiral. Je fus aussi présenté chez l’intendant, le comte de Villa-Nueva, qui est la seconde autorité de la Havane. Son palais est le plus beau de la ville. En le visitant, il me fit remarquer avec tant soit peu de malice les coqs du gouverneur. Vivès ne sort jamais de chez lui, et son unique et sa plus chère occupation est de veiller à la santé et à l’éducation de ses coqs, qui, du reste, sont superbes. Je voyais de la fenêtre leurs maisons séparées avec leurs noms inscrits dessus, et l’arène sablée où se livrent leurs combats. Vivès a écrit sur ce sujet un long ouvrage qu’il a intitulé Gallomachia : aussi le gouverneur s’occupant exclusivement de pareilles puérilités, n’y a-t-il aucune police dans la ville. Les pirates, qui assassinent et massacrent les équipages des bâtimens de ces parages, vivent impunément à Regla, à un demi-mille de la Havane.

Dans une promenade que je fis à ce village, je comptai vingt-cinq tables de jeu les unes près des autres, et