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L’ASTROLABE À TONGA-TABOU.

Français seraient rendus à leur navire. J’insistai sur le mot tous, alléguant qu’il ne devait point y avoir d’exception, attendu que j’étais responsable de leurs personnes envers mon gouvernement. Si les naturels ne souscrivaient point à cette condition, j’étais résolu à ne point quitter Tonga-Tabou sans avoir détruit Mafanga de fond en comble.

Je parlai dans le même sens aux Anglais, et les priai de faire part aux insulaires de ma dernière résolution. L’un d’eux voulant me faire des représentations sur les forces supérieures des naturels, et sur les grands dangers que j’allais courir en m’approchant des récifs de Mafanga, je lui répondis d’un ton bref et péremptoire que ma résolution était invariable, et que les sauvages devaient rendre tous leurs prisonniers, ou s’attendre à voir Mafanga réduit en poussière ; puis, sous prétexte qu’il était tard, je m’empressai de les congédier, ayant remarqué que leurs discours produisaient une impression fâcheuse sur les hommes de l’équipage.

(15 mai). N’ayant reçu aucune nouvelle de nos prisonniers, et ne voyant les naturels faire aucun mouvement qui annonçât l’intention de les rendre, à sept heures du matin les huniers furent bordés, l’ancre dérapée, et nous cinglâmes vers Mafanga, sous les huniers seulement. Le grand canot marchait devant la corvette, sous les ordres de M. Lottin, pour éclairer notre route. Comme la marée haute ne nous permettait point de distinguer l’acore du brisant, à sept heures quarante minutes je laissai retomber l’ancre devant Mafanga, à un quart de mille du rivage, et à une encâblure des coraux. À huit heures et demie la chaloupe fut mise à la mer, pour aider à nous rapprocher des récifs.

À l’instant même où nous avions laissé tomber l’ancre, nous avions hissé notre grande enseigne en l’appuyant d’un coup de canon. Peu après, plusieurs pavillons blancs furent successivement plantés au bout de longues perches sur le rivage, et je suppose que chaque chef arbora le sien. Le blanc ayant été de tout temps l’emblème de la paix chez les habitans de la mer du sud, je supposai que ceux de Tonga vou-