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REVUE. — CHRONIQUE.

Eh bien ! quand sous les coups que votre main lui porte,
Elle sera tombée, et qu’on la croira morte ;
Que l’Anglais en viendra partager les débris,
C’est alors que partout vous poursuivront ses cris…
Vous fuirez ; mais dans son agonie, un royaume
Se débat plus long-temps que ne le fait un homme…
Le feu de nos cités sera votre flambeau ;
Vos pieds à chaque pas heurteront un tombeau…
Vous fuirez, vous fuirez sans que rien vous arrête,
Car vous ne saurez plus où poser votre tête !

AGNÈS.

Grâce, grâce !…

LE COMTE.

Grâce, grâce !… Nos fils… ce qu’il en restera,
En vous voyant passer, de ses cris vous suivra ;
Les mourans, pour maudire à leur heure dernière,
Accoudés sur leurs lits, rouvriront la paupière ;
À leur voix se joindra la voix de votre cœur,
Et toutes vous criront : « Malheur à vous ! malheur !…

AGNÈS, à genoux

Monseigneur, il n’est rien qu’un repentir n’efface…
Cela ne sera pas, monseigneur… grâce ! grâce !
Oh ! tout n’est pas encor si bas que vous croyez,
Et la main qui blessa peut guérir !

LE COMTE.

Et la main qui blessa peut guérir ! Essayez !

Cela est vraiment fort beau, n’est-ce pas ?

Nous voudrions pouvoir citer toute la scène du quatrième acte, quand le roi se couvre d’une armure et va se battre pour venger la vieille noblesse qui vient de tomber pour lui ; mais la scène est longue, et elle gagne beaucoup à être vue. Au quatrième acte finit l’histoire : la fable du drame reparaît ; reviennent Yaquoub et Bérengère ; Bérengère, c’est Hermione chrétienne ; Yaquoub, c’est Oreste au moyen âge. Vraie ou fausse, cette jalousie transplantée dans ce drame n’est pas sans intérêt et sans charme. Yaquoub le Sarrasin, vivant librement avec des chrétiens de cette époque, est peut-être un mensonge historique ; mais Yaquoub est beau, énergique et passionné, bien qu’un peu trop parleur et philosophe.