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LITTÉRATURE.

Le domestique.

Seigneur.

Don Pèdre.

Allez chez la comtesse de Porto Carrero, et qu’elle vienne à l’instant.

Le domestique.

Sire, elle attend audience depuis une heure à la porte du palais…

Don Pèdre.

Qu’elle entre, qu’elle entre !…

(Entre la comtesse.)
Don Pèdre.

Arrive ici, comtesse. Ton fils a tué le comte de Porto Carrero, ton époux. Songe à me répondre ici comme tu répondrais à Dieu au jugement dernier ; point de détour, de subterfuge, de mensonge. Ce jeune homme de si haute espérance, d’un si beau caractère, cet amant adoré de dona Maria Pirez n’a pu tuer son père, c’est impossible. Le comte ne l’était point ; tu as eu ce fils d’un autre que de lui : réponds.

La Comtesse, tombant à genoux.

Seigneur, je venais pour vous l’avouer…

Don Pèdre.

Raconte-moi toute cette histoire, et que ta mémoire soit fidèle.

La Comtesse.

Seigneur, je ne tairai rien de mon crime, puisqu’il diminue celui de mon fils. Je fus mariée jeune, malgré moi, au comte de Porto Carrero : j’aimais alors don Alphonse Ribeyro. Le comte, forcé par les devoirs de sa charge de chambellan d’habiter Lisbonne quelques mois de l’été, me laissa à son château d’Amarillas. Alphonse revint bientôt par le désespoir à l’espérance ; il osa me suivre secrètement à Amarillas. Une nuit, il pénétra dans mon appartement sans être vu… Je luttai long-temps ; mais j’étais faible, et j’aimais… Horrible faute, dont les suites furent plus horribles encore… Je parvins à le cacher et à le soustraire long-temps aux yeux de mes