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HISTOIRE. — PHILOSOPHIE.

connaissances historiques[1], recommandaient son nom à la confiance du peuple. Mais accepterait-il ce poste éminent ? c’est ce qu’on ne pouvait préjuger ; car naturellement peu parleur, il ne s’était jamais ouvert à cet égard. Les coteries aristocratiques d’ailleurs, qui imposaient souvent leur volonté à la diète, sans être ouvertement hostiles à Lelewel, redoutaient son influence. On rappelait d’anciennes calomnies ; et quoiqu’on n’y ajoutât pas la moindre foi depuis la découverte de sa prétendue conspiration, on voulait cependant vaincre son silence : on lui demandait des garanties. Plusieurs membres de la diète lui proposèrent la présidence du gouvernement national sans condition ; d’autres plus circonspects exigeaient qu’il publiât dans les journaux sa profession de foi politique, qu’il démentît de nouveau le bruit de sa participation à la rédaction de la Nouvelle-Pologne, qu’il renonçât enfin à la présidence de la société patriotique, quoiqu’il n’y eût occupé le fauteuil qu’une seule fois depuis la révolution. Mais Lelewel se refusa à toutes ces démarches, disant qu’une pareille conduite lui ferait jouer aux yeux de la nation le misérable rôle d’un ambitieux. Ce refus favorisait les vues secrètes de ces coteries aristocratiques, qui, toujours vaincues dans les diètes polonaises, renaissaient toujours de leurs cendres. Pour diminuer le nombre des partisans de Lelewel, on alla jusqu’à insinuer qu’il affectait un profond mépris pour la chambre des nonces en n’assistant que très-rarement à ses séances, oubliant que, ministre, membre du conseil suprême et des commissions de la chambre elle-même, il travaillait nuit et jour dans ces trois branches du pouvoir.

Après la promulgation de la loi du 29 janvier, on fit de nouvelles propositions à Lelewel ; mais il se plaignit amèrement que cette loi écartât du sénat et de la chambre des nonces les membres du nouveau gouvernement : « Mes fonc-

  1. On a dit de lui qu’il est aussi capable d’écrire l’histoire de Pologne que de la faire.