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ÉPOPÉE DES BOHÊMES.

de grêle ; et à côté s’élance Slawoj, pareil à une nuée de grêle.

» Frères, voyez, ce sont eux qui ont brisé nos dieux ; ils ont renversé nos arbres et chassé les éperviers de la forêt. Les dieux nous promettent la victoire.

» Voyez, un sourire sauvage échappé à Ludiek quand d’innombrables meurtriers marchent contre Zaboj. Zaboj s’élance contre Ludiek avec des yeux brillans de flamme ; la tempête pousse le chêne contre le chêne, qui se brise au bord de la forêt. Zaboj se précipite sur Ludiek, loin en avant du reste de l’armée.

« Voyez, Ludiek se lève avec son épée frémissante, et son bouclier couvert d’une triple peau. Zaboj brandit sa hache d’armes. Ludiek s’élance de côté. La hache rencontre un arbre, et l’arbre tombe sur les guerriers ; trente d’entre eux s’en vont rejoindre leurs pères.

» Ludiek frémit. Ah ! toi, loup des forêts ; toi, dragon sauvage, lutte contre moi avec l’épée.

» Et Zaboj s’élance à son épée. Il frappe un coup sur le bouclier. Ludiek a saisi son épée ; mais l’épée a glissé sur le bouclier de cuir. Tous deux s’enflamment à un horrible combat ; ils se fouillent tous deux avec le glaive, ils couvrent la terre de sang, et avec le sang les étincelles jaillissent autour d’eux dans un meurtre sauvage.

» Le soleil a marché vers le milieu du jour, le milieu du jour s’approche déjà du soir ; et le combat durait encore, et ni ici, ni là, on n’avait pas encore vaincu. Si bien avait lutté Zaboj, si bien avait lutté Slawoj.

» Va à Bjes, toi lâche ! que veux-tu boire notre sang ? Zaboj saisit sa hache d’armes. Ludieck s’élance de côté. Zaboj brandit sa hache d’armes dans l’air ; il la lance sur l’ennemi ; la hache poursuit l’ennemi, et le bouclier se brise, et le bouclier aussi se brise par derrière, et la poitrine de Ludieck se brise. Sous la hache furieuse, l’âme a tressailli, car la hache a atteint l’âme ; elle rebondit dans l’armée à plus de vingt pas.