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RÉVOLUTION POLONAISE.

lérer le développement de l’esprit national. Il défendait Lubecki dans les journaux et dans la société patriotique, et Lubecki, de son côté, était persuadé que l’admission de Lelewel dans le conseil d’administration assurait seule au gouvernement l’obéissance du peuple. Ils se donnaient donc la main pour empêcher la révolution de sortir brusquement des voies légales.

La société patriotique était composée en grande partie de la jeunesse de la Lithuanie, de la Pologne prussienne et de la Pologne autrichienne. Les clubs crièrent à l’indépendance de toute l’ancienne Pologne, mais Lelewel leur rappela que la diète était le seul et légitime représentant de la nation, et qu’à elle seule appartenait le droit de prononcer sur cette question. Il exhortait ses amis à respecter le principe de non-intervention, proclamé par la diplomatie européenne.

Menacé d’un chute prochaine, le conseil d’administration abdiqua un instant son pouvoir en faveur du comité exécutif ; et le 4 décembre, après la chute de ce comité, il se déclara dissout lui-même, après avoir créé le gouvernement provisoire, composé des sénateurs Czartoryski, Pac, Kochanowski, Dembowski, et des nonces Lelewel et Vladislas Ostrowski.

Mais le conseil d’administration ne pouvait se décider à signer l’acte d’inauguration du nouveau gouvernement ; Lubecki et surtout Mostowski refusaient formellement leurs signatures. Les membres du nouveau gouvernement furent donc obligés de se constituer eux-mêmes. Ainsi, la légalité passa du pouvoir constitutionnel aux hommes nommés par lui.

Alors parut sur la scène politique le général Chlopicki. Célèbre par son intrépidité dans les armées de Napoléon, et justement appelé par le maréchal Suchet le brave des braves, il avait l’estime de toute l’armée polonaise et la haine du Czarévitch. Obligé par lui de demander sa démission, il vécut dans la retraite, avec une modeste fortune qui suffisait à ses besoins. Lors de l’insurrection, le peuple, qui admirait son