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VOYAGES.

On se condamne au tapou, au départ d’une personne chérie, pour attirer sur elle la protection de la Divinité. La mère de Shongui se taboua, lorsque ce chef partit pour l’Angleterre, et une femme était chargée de la faire manger. Alors le tapou représente assez bien ce que quelques dévots catholiques entendent par le mot vœu.

Quand une tribu entreprend la guerre, une prêtresse se taboue ; elle s’interdit toute nourriture durant deux jours : le troisième, elle accomplit certaines cérémonies, pour attirer la bénédiction divine sur les armes de la tribu.

Il est des saisons et des circonstances où tout le poisson qu’on pèche est tapou, surtout quand il s’agit de faire les provisions d’hiver. Là, on retrouve le but politique qui fit instituer les carêmes, et autres abstinences semblables, en Europe et ailleurs.

Un jour, M. Kendall ayant offert du porc à Waraki, qui était venu le visiter tandis qu’il dînait, ce chef en mit un morceau entre ses dents, fit une longue prière, et le jeta ensuite ; puis il dit qu’il allait manger comme à l’ordinaire.

C’est par le tapou que les Zélandais scellent un marché d’une manière inviolable : quand ils ont arrêté leur choix sur un objet qu’ils n’ont pas le moyen de payer sur-le-champ, ils y attachent un fil, en proférant le mot tapou ; on est certain qu’ils viendront le reprendre dès qu’ils pourront en livrer la valeur.

Le tapou joue ainsi le rôle le plus important dans l’existence du Nouveau-Zélandais. Il dirige, détermine ou modifie la plupart de ses actions. Par le tapou, la Divinité intervient toujours dans les moindres actes de sa vie publique et privée ; et l’on sent quelle influence