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DE L’AVENIR DES RELIGIONS.

Cependant, non sans doute, l’histoire des religions n’est pas finie, non plus que l’histoire de l’humanité. Si le catholicisme doit vivre aussi long-temps que le type de nos sociétés occidentales, pourtant un jour ce type périra, et avec lui le culte fait pour lui. Mais à quelle condition verra-t-on ce changement, et de quels signes sera-t-il précédé ? La philosophie de l’histoire peut nous donner quelque lumière sur cette question.

Pour cela, il est nécessaire de sortir de l’horizon des sectes, et de contempler le mouvement de l’histoire, non pas seulement dans la sphère des préoccupations des peuples, mais au centre même de l’univers ; car une religion n’est pas un fait social, mais une idée cosmogonique, le cri tout entier de l’univers, une parole depuis long-temps contenue dans la création, et que chaque objet vient à prononcer par la bouche d’un peuple. L’homme lui seul peut produire la science. Pour enfanter une révolution religieuse, il faut que la nature tout entière soit complice avec lui : sinon, c’est tout au plus une révolte dans l’infini, une pensée demi-éclose, qui, sans écho dans le monde, sans éclat au soleil, se perd et s’évanouit dans le sein qu’elle a fait battre un jour. Ah ! sans doute la trame de l’âme humaine est loin d’avoir été déroulée tout entière entre les mains du tisserand : à peine si quelques parties plus saillantes ont surgi de la nuit, et ont commencé de poindre dans le tissu de l’histoire. Qui n’a senti dans les replis de sa pensée des forces inconnues, des voix renfermées, et presque le murmure d’un lointain rivage où l’on doit aborder ! Sous nos pressentimens d’immortalité dorment enfouis dans des limbes terrestres, les formes futures, les dynasties d’idées, les empires à venir, qui s’éveilleront après nous et sans nous. Or, telle est la