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GEORGE FARCY.

a entrepris contre les ennemis de son pays, mais qui est mort victime des dissensions civiles. »

Peut-être après tout, ces nobles épitaphes de héros ne lui revinrent-elles à l’esprit que le mardi, dans l’intervalle des ordonnances à l’insurrection, et comme un écho naturel des héroïques battemens de son cœur. Le mercredi, vers les deux heures après midi, à la nouvelle du combat, il arrivait à Paris, rue d’Enfer, chez son ami Colin, qui se trouvait alors en Angleterre. Il alla droit à une panoplie d’armes rares, suspendue dans le cabinet de son ami, et il se munit d’un sabre, d’un fusil et de pistolets ; madame Colin essayait de le retenir, et lui recommandait la prudence : « Eh ! qui se dévouera, madame, lui répondit-il, si nous, qui n’avons ni femme, ni enfans, nous ne bougeons pas ! » Et il sortit pour parcourir la ville. L’aspect du mouvement lui parut d’abord plus incertain qu’il n’aurait souhaité : il vit quelques amis ; les conjectures étaient contradictoires. Il courut au bureau du Globe, et de là à la maison de santé de M. Pinel, à Chaillot, où M. Dubois, rédacteur en chef du Journal, était détenu. Les troupes royales occupaient les Champs-Élysées, et il lui fallut passer la nuit dans l’appartement de M. Dubois. Son idée fixe, sa crainte était le manque de direction ; il cherchait les chefs du mouvement, des noms signalés, et il n’en trouvait pas. Il revint le jeudi de grand matin à la ville, par le faubourg et la rue Saint-Honoré, de compagnie avec M. Magnin ; chemin fesant, la vue de quelques cadavres lui remit la colère au cœur et aussi l’espoir. Arrivé à la rue Dauphine, il se sépara de M. Magnin, en disant : « Pour moi, je vais reprendre mon fusil que j’ai laissé ici près, et me battre. » Il revit pourtant dans la matinée M. Cousin, qui voulut le retenir à la mairie du onzième arrondissement, et M. Géruzèz, auquel il dit cette parole d’une magnanime équité : « Voici des événemens dont, plus que personne, nous profiterons ; c’est donc à nous d’y prendre part et d’y aider. » Il se porta avec les attaquans