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LA NIÈCE DU GOUVERNEUR.

que une chambre élégante, (À part.) Tout ceci n’est pas clair. (Haut.) Mais reprends ton poignard, je ne veux pas devancer le bourreau : il faut que la leçon soit complète, que l’Espagnol nous ait long-temps sous les yeux et ne nous voie pas refuser une goutte du calice de fiel ; il faut que de notre échafaud nous l’appelions à la liberté. Nous n’aurons jamais assez de sang pour féconder le sol de la patrie… L’heure de l’audience ne peut tarder…

D. Louis.

Je dois, Casterey, te prévenir d’une chose qui pourrait t’étonner. Quoique l’on m’épargne la torture, ma mort est certaine, et je ne chercherai pas à l’éviter. J’ai conspiré contre d’Ayamonte, je l’avouerai, je m’en glorifierai même ; mais avec la même franchise je dois rétracter devant mes juges une calomnie infâme que j’ai avancée sans preuves contre une créature céleste, la nièce de ce damné d’Ayamonte : c’est celle que le hasard m’a fait sauver hier des mains de trois de nos conspirateurs qui l’attaquaient comme des brigands, et dont le hasard m’a rendu aussi amoureux, sans la connaître, que je suis ennemi de d’Ayamonte.

Caseterey.

Ah ! tout est expliqué ; j’apprends à te connaître.

D. Louis.

Comment ?…

Caseterey.

Cette complaisance est sans doute le prix de ta grâce. C’est juste en effet. On t’emploie à rendre l’honneur à une femme perdue ; on te paie d’un prix aussi vil que ton métier ; on t’accorde une existence déshonorée et servile, et de prisonnier tu vas devenir esclave.

D. Louis, furieux.

Casterey !…

Caseterey.

Vis, vis ; nous le désirons, nous l’exigeons même ; moi et mes braves compagnons, nous t’exilons de notre mort : qui