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MANILLE.

par le vent, font un bruit suffisant pour éloigner toute espèce d’animaux. On a recours à un expédient semblable dans quelques provinces de France, pour faire peur aux fouines, aux belettes et aux renards, et les empêcher d’attaquer les poulaillers.

La première nuit que je passai dans les cases élevées des montagnes où je me trouvais, je fus saisi par un froid excessif. Les indigènes n’ont pas de lit ; ils se couchent à terre, sur des nattes ; j’étais obligé de me conformer à leur usage ; j’avais même négligé de me couvrir pendant mon sommeil. Le froid me parut, vers le milieu de la nuit, si rigoureux, que je fus obligé de me lever pour allumer du feu. Je me rendis facilement compte de cette température glaciale, en songeant que j’étais à environ dix-sept lieues de la mer, et à une hauteur considérable au-dessus de son niveau.

Quoique ce ne fût pas l’époque de la floraison des plantes, je recueillis néanmoins beaucoup de végétaux vivans, dont une grande partie était encore inconnue. Les graines n’étaient pas non plus en parfaite maturité, mais cela ne m’empêcha point d’en récolter une bonne provision.

Je m’enfonçai dans l’épaisseur des vastes forêts qui couvrent ces montagnes ; je pénétrai dans la profondeur des collines les plus reculées. C’est dans ces derniers lieux que j’observai quelques belles espèces de bégonia, que je n’avais encore trouvées nulle part, ainsi que deux espèces de besleria extrêmement curieuses. Je remarquai dans les forêts un des plus beaux arbres qui existent, de la famille des sapotilliers et du genre chrysophyllum[1]. L’arbol abrea des Indiens, qui croît dans ces

  1. Je l’ai rapporté vivant au Jardin des Plantes de Paris, où il est aujourd’hui en plein état de végétation.