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VARIÉTÉS.

faits, acceptent le milieu, non comme une vérité absolue, mais comme une réalité utile, mais comme l’équilibre naturel des choses du monde, comme l’assiette, bonne ou mauvaise, que reprend toujours la société à la suite des oscillations qu’elle subit de temps en temps. Ce milieu, les gens sensés ne peuvent sérieusement le condamner : seulement ils peuvent trouver que leurs adversaires ne le placent pas où il est réellement. Il est mobile et progressif, comme toutes choses humaines. Il se déplace d’époque en époque, de révolution en révolution. Il est le produit net de chaque bouleversement, et l’expression du degré de perfectionnement où est arrivée la masse sociale. Les âmes généreuses qui s’impatientent de la lenteur du progrès et de la ténacité des abus, des sottises, s’indignent de voir le milieu où il se trouve ; elles ne peuvent le croire encore si arriéré. Mais il faut bien se résigner, et attendre encore pour qu’il se rapproche de l’avant-garde de notre civilisation. Patience : chaque chose doit arriver en son temps, pour réussir et durer. Laissons le milieu cheminer entre le mouvement et la résistance. N’oublions pas non plus que la résistance est indispensable au mouvement : en physique, on ne peut même concevoir celui-ci sans celle-là ; en politique, on ne le peut davantage.

LA PAIRIE DE LA RESTAURATION.

Louis xviii fit une pairie, non-seulement pour satisfaire le sénat impérial qui l’avait appelé à cette condition, mais encore pour imiter ce qu’il avait vu en Angleterre.

Mais la pairie anglaise est-elle imitable en France ? Non, parce qu’elle est loin de nous convenir, et ensuite parce que nous n’avons pas de quoi l’imiter.

La faute de Louis xviii fut d’avoir conçu une pairie moitié anglaise, moitié impériale : anglaise par quelques formes touchant l’institution, l’âge, les titres, etc. ; impériale par le secret des délibérations, secret du reste assez peu respecté. Il est résulté de là un corps sans action, sans vie à lui propre,