Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 2.djvu/30

Cette page a été validée par deux contributeurs.
20
VOYAGES.

tecture avait jusqu’ici bravé les efforts de tant de siècles, était brisée en éclats[1]. C’était, dit-on, le plus antique modèle de l’ordre corinthien connu, puisque Lysicrates était contemporain d’Alexandre. La couleur d’un blanc si pur, que les fragmens du marbre avaient conservée, ne permettait pas de douter que cet acte de vandalisme ne fût très-récent ; il nous semblait voir les chairs vives d’une blessure, et nous comprîmes alors toute la vérité du sentiment exprimé dans Child-Harold : « Ô Grèce, bien froid est le cœur de l’homme qui peut te voir et ne pas sentir, à l’aspect de tes temples en ruine et de tes saints autels renversés, ce qu’éprouve un amant auprès des cendres de celle qu’il aima ! » Nous étions d’autant plus douloureusement affectés que ce petit édifice appartient à la France ; il est, comme on le sait, enclavé dans l’ancien couvent de notre mission des capucins, acheté par notre compatriote le père Simon, en 1669.

Il était loin de notre pensée de supposer qu’une excursion aussi rapide pût permettre quelque découverte ; le hasard nous servit pourtant. Nous quittions la tour des Vents, charmés de voir qu’elle n’avait aucunement souffert, et nous avancions derrière le Pœcile par un chemin que nous frayions nous-mêmes : un petit édifice, soutenu par cinq colonnes d’ordre corinthien, d’une disposition assez élégante, parut tout à coup devant nous. Nous l’examinâmes avec un vif intérêt, car tout porte à penser qu’il est encore inconnu ; telle est au moins l’opinion du jeune et savant architecte qui nous accompagnait, et qui en prit avec soin les plans et l’élévation.

  1. On avait publié que l’incendie du couvent auquel il était attenant l’avait détruit ; le fait est faux.