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VOYAGES.

chers à pic, ses collines verdoyantes, a porté le nom de France Antarctique ; on sait encore moins peut-être que c’est à deux Français ennemis par religion et rivaux comme historiens qu’on doit les premières notions un peu complètes que l’on ait eues sur le Brésil et sur les nations guerrières qui le parcouraient. Le premier est Jean de Lery, natif du duché de Bourgogne, comme il le dit lui-même, et protestant, fuyant les persécutions de l’Europe, et cherchant une patrie nouvelle aux doux climats de Guenabara[1]. Le second, André Thevet, est un moine, grand explorateur de contrées nouvelles, voyant rapidement, mais avec sagacité, et revêtu du titre pompeux de cosmographe du roi. Si l’on en excepte les récits curieux, mais un peu romanesques, d’Hans Staden[2], quelques documens raisonables publiés par Hackluit[3], et quelques roteiros (routiers) fournis par les navigateurs et par les colons qui envoyaient à Lisbonne les divers matériaux dont se servit Jean de Barros pour écrire sur le Brésil cette histoire qui n’a point paru, les renseignemens qui parvenaient sur ce beau pays étaient dus, pour la plupart, aux récits mensongers des navigateurs normands, employés au xvie siècle comme interprètes dans les relations commerciales qu’on avait avec les nations indiennes. Quelques-uns de ces hommes, tirés d’une classe corrompue, apportaient trop souvent aux sauvages l’exemple des vices de l’Europe, et puisaient dans la barbarie de ces nations une férocité

  1. Les Tupinambas avaient donné ce nom à la baie de Rio de Janeiro.
  2. Hans Staden a publié sa relation dès 1556. Thevet a donné la sienne, en 1558, et le livre de Lery, composé en 1556, n’a paru qu’en 1578.
  3. On peut consulter dans cette collection Hatkins, 1530, 1532, Reniger et Forêt, 1540 ; Pudsey, 1542 ; Hare, 1580 ; Lancaster, 1594.