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VARIÉTÉS.

lendemain à midi, pour les eaux de Saratoga ; je passai d’abord par la petite ville de Skenectady, bâtie sur le canal, ensuite par les eaux de Ballston, et à huit heures et demie du soir j’entrai à Saratoga : c’est le lieu de réunion de tous les voyageurs des États-Unis. Les élégans, ou pour parler comme dans le pays, les beaux et les belles s’y donnent rendez-vous. C’est une véritable lanterne magique, où chaque jour se présentent cent ou deux cents figures nouvelles, et où une semaine s’écoule très-agréablement. La voiture s’arrêta à la porte du Congress-Hall, où résonnaient de nombreux instrumens ; les fenêtres, étincelantes de bougies, laissaient voir des têtes couronnées de fleurs, des têtes blondes, des têtes frisées, s’agitant, se mêlant en mesure. Tout y était plein ; il fallut aller plus loin, à l’United-States hotel. L’escalier et la galerie y étaient couverts de jeunes gens et de jeunes personnes qui montaient en voiture pour se rendre au bal d’où nous venions. Nous n’y fûmes pas plus heureux. Enfin nous trouvâmes à nous placer au Pavillion.

Les eaux minérales de Saratoga sont très-efficaces ; mais on y va en général plutôt par amusement que par motif de santé, et surtout aussi pour quitter la ville, où la chaleur est insupportable. C’est là que se trouve réunie toute la société des États-Unis, sud, nord, est et ouest.

Bien avant le déjeûner, qui a lieu à huit heures, ceux qui veulent jouir de tous les plaisirs, vont boire à la fontaine sept à huit verres d’eau, et reviennent avec appétit. La salle à manger de mon hôtel était grande, et près de deux cents personnes s’y réunissaient tous les jours. En sortant de table, on va faire sa toilette, on se rend au salon, on fait quelques visites aux autres hôtels, ou on se promène sous les grands verandahs, où tout le monde est réuni. On rentre au salon, et souvent on y voit un cercle formé autour de quelque jeune personne timide que sa mère y aura envoyée. Elle joue une sonate sur le piano, ou chante Nel cor piu mi sento, ou O Pescator. Bien ou mal, on se tait, on n’en parle pas, et l’heure