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LITTÉRATURE ÉTRANGÈRE.


rant leurs ouvrages, les lisaient peu. Mais la muse de Dmitrief obtint le droit d’entrée dans les salons et les boudoirs, tant les grâces de son style et la mélodie de sa versification eurent de pouvoir sur les âmes les plus indifférentes en matière de belles-lettres. Ce poète a surtout excellé dans la fable et dans le conte : son Yermak, ou la conquête de la Sibérie, et sa Modnaïa-Géna (la petite maîtresse), sont les deux morceaux où il a montré le plus de talent.

Depuis le commencement du siècle, et sous les auspices d’Alexandre, toutes les branches de la littérature ont éprouvé des améliorations sensibles : le style poétique, l’histoire, l’éloquence de la chaire et l’art dramatique se sont montrés avec un nouvel éclat ; Ozérof comprit mieux la tragédie : ce poète sut faire jouer plus habilement que ses devanciers le ressort de la terreur. Sa tragédie de Dmitri Donskoï et celle de Fingal ont remporté la palme chez les Russes ; elles sont le plus bel ornement de leur théâtre. À mesure que le goût s’est formé, que les lumières se sont répandues, les lecteurs sont devenus plus difficiles ; ils ont dû exiger plus rigoureusement l’observation des connaissances littéraires. MM. Merzliakof, Pouschkine (Alexandre), Joukofsky, Batiouschkof, Gniéditsch, le prince Viazemiky, concourent avec M. Dmitrief au perfectionnement de l’art : l’horizon s’est agrandi devant eux, les richesses du goût se sont multipliées, les secrets de la poésie imitative ont été mieux connus. M. Krilof, le seul fabuliste qui puisse approcher de La Fontaine, s’en est servi avec un rare bonheur dans ses apologues, qui sont un des plus précieux monumens de l’école classique. M. Izmaïlof, agréable fabuliste et conteur spirituel, s’est distingué particulièrement dans l’art de peindre avec vérité les mœurs po-

    de ses prépositions gouverne un cas différent. La multiplicité des finales devient un puissant moyen d’harmonie, et la poésie s’en sert avec le plus grand succès. Un des plus précieux avantages du russe, c’est aussi d’exprimer les plus légères nuances de la pensée par un seul mot, composé d’une préposition et d’un verbe radical.