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MORT DU CAPITAINE POWELL.

rope, avait conçu la plus vive affection pour John, le jeune protégé du capitaine. Qui aurait prévu que cette heureuse harmonie allait cesser tout à coup, qu’une mésintelligence légère et l’amour d’une jeune fille causeraient les plus grands désastres, en devenant aussi fatals aux naturels qu’aux étrangers ?

Le quatrième jour de sa relâche, la nuit commençait à s’étendre sur le mouillage, quand un émissaire vint prier le roi de descendre à terre. Celui-ci se rendit à ce désir avec une précipitation qui inspira des soupçons trop tardifs. Il n’était plus possible de le retenir, quand l’appel de l’équipage fit découvrir l’absence de cinq hommes. John était du nombre. La méfiance devint extrême, et toutes les craintes furent augmentées par le rapport d’un Indien, qui, après un séjour de quelques années dans l’île, venait de prendre service sur le Rambler. S’étant chargé d’aller à terre, il avait trouvé toute la population agitée, et se disposant à prendre le parti des déserteurs. Persévérant dans son dévoûment, il accepta une nouvelle mission auprès du chef, avec lequel il reçut ordre de traiter d’abord pour le renvoi des cinq hommes, et en cas de non réussite, pour la rançon du seul John. Rien ne put décider Howloulala à renvoyer tous les blancs qui s’étaient joints à sa peuplade ; mais il se montra plus accessible quand, pour l’échange de John, on lui offrit quelques livres de poudre, une provision de balles, des pierres à fusil et un mousquet. Le marché allait se conclure, mais au moment décisif, la spéculation du politique et du commerçant connut la tendresse du père. Il ne put résister aux pleurs d’Ozela, qui le supplia, avec toute l’éloquence du désespoir, de ne point la séparer de son amant ; elle aimait mieux le suivre en Europe, que de le voir quit-