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TERRE-NEUVE.

une compagnie plus agréable que la sienne et celle de M. Brou, commandant la corvette qui devait nous y conduire.

Je partis de Brest le 28 avril 1828, sur la Cérès, corvette de 18, commandant la station de Terre-Neuve, avec la gabarre le Chameau et deux goëlettes de 8 la Béarnaise et la Mésange.

Le 17 mai, étant par 52° 21′ longitude et 45° 32′ latitude, on vint me réveiller pour me faire voir une montagne de glace, qui se trouvait par notre travers à tribord. Nous en étions à un demi-mille de distance, et le vent qui soufflait de ce côté nous glaçait à bord : sa hauteur pouvait être de 350 à 400 pieds, et sa largeur d’une lieue. C’était pour tout l’équipage, qui n’avait pas encore navigué dans ces parages, un spectacle aussi nouveau que pour moi. Nous en vîmes encore les jours suivans, et une, entre autres, de quatre lieues de large et de douze cents pieds de haut ; on dirait de grandes îles sortant de la mer, et le matin et le soir c’est un spectacle magnifique que de voir ces masses éclatantes dorées par les feux du soleil.

Nous vîmes des marsouins, des souffleurs, des baleines ; et après avoir pris quelques morues sur le Grand Blanc, et tiré quelques coups de canon à poudre sur d’inoffensifs bâtimens dont tout le tort était de ne pas nous hisser leurs couleurs, nous arrivâmes le 27 mai à quatre heures du soir à l’île de Saint-Pierre, et jetâmes l’ancre près du Cap à l’Aigle.

Il y faisait très-froid, et par la neige qui restait