Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 1.djvu/226

Cette page a été validée par deux contributeurs.
214
CORRESPONDANCE ET VARIÉTÉS.

comme les Sioux, n’épargnaient jamais ni le sexe ni l’âge. Cependant il ne poussa pas un seul soupir, et donna aux yeux de ses compagnons une preuve plus grande, plus énergique de ses regrets, en jurant de ne pas prendre une seconde femme qu’il n’eût enlevé les chevelures de cinq guerriers mandans. Il remplit son carquois, sella son cheval, entonna son chant de guerre, et partit, suivi de quelques amis. Quelques lunes s’étaient à peine écoulées, que son vœu était accompli, et que les cinq chevelures pendaient à la cheminée de la hutte de Payton Skah, qui, toujours triste et rêveur, paraissait ne pas songer à former de nouveaux liens. Mais sa mère, désirant l’arracher à cet état funeste, demanda pour lui la jeune Chuntay Washtay, que sa famille accorda avec empressement au jeune guerrier. Il l’accepta, de son côté, pour ne pas contrarier les désirs de sa vieille mère, et finit par éprouver pour elle cette espèce d’attachement et d’affection calme qui est toujours la suite de l’habitude de vivre ensemble.

Un jeune Yankton, qui avait demandé Chuntay Washtay avant son mariage, et s’était vu rebuté par ses parens, commença à faire de fréquentes visites à Payton Skah. Mais comme celui-ci ne s’apercevait pas que sa femme lui témoignât le moindre penchant, il était loin de concevoir de l’ombrage de ses assiduités. Le temps devait bientôt à cet égard lui apporter de terribles révélations.

Un jour Chuntay Washtay engagea son époux à aller à la chasse des buffles qui parcouraient la prairie. « Ils se tiennent trop éloignés, lui dit-elle, pour que vous puissiez revenir le même jour ; mais si votre chasse est heureuse, vous pourrez me revoir demain. » Le guerrier se rendit à son désir, promit à sa femme de ne pas se faire attendre et partit sans délai. Son léger coursier le porta avec la rapidité des vents à l’endroit de la prairie fréquenté par les buffles. Il en tua deux en peu d’instans ; il les suspendit aux branches d’un arbre, et comme le jour n’était pas très-avancé, il pensa qu’il avait encore le temps de se rendre à sa hutte, où il