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VOYAGES.

négociant anglais, emportée comme un éclair par huit petits chevaux Byma. Derrière ce fou vient un peu moins vite un flegmatique Hollandais qui, nonchalamment étendu dans son landau, fume encore la pipe qu’il a allumée à son dessert, tandis que son vigilant domestique a suspendu à l’essieu du carrosse une longue mêche qui doit servir à allumer toutes celles qu’il fumera dans le cours de son agréable promenade. On aperçoit çà et là quelques jolies cavalcades, et un grand nombre de cabriolets élégans et légers, attelés d’un ou de deux chevaux que conduisent des jeunes gens qui se glissent parmi ces nombreuses voitures sans redouter aucun accident, car chacun guide son équipage avec une merveilleuse adresse.

La promenade terminée, on rentre chez soi ; les dames versent alternativement le thé et le café, placés dans des vases d’argent ou de vermeil à robinet ; et les hommes, rangés autour d’une table chargée de bière, de genièvre et de différens vins, envoient aussi gravement que galamment au visage de leurs compagnes la fumée de leurs pipes. Le lendemain ramène les mêmes occupations et les mêmes plaisirs, le surlendemain et les jours suivans ne diffèrent en rien. La monotonie règne ainsi toute l’année dans les maisons les plus opulentes, et avec elle l’ennui qui en est inséparable.

Quoique issus pour la plupart de pères européens, les créoles de Batavia sont en général d’un brun très-foncé ; leurs traits conservent toujours le caractère malais, qui leur est transmis par leurs