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ASIE.

véritable débouché serait par les ports de la Syrie. Cela est si vrai, que, malgré tous les obstacles, les opérations commerciales tendent encore vers leur direction naturelle ; les caravanes qui vont de Bagdad à Damas, et réciproquement, sont encore considérables. Elles se composent presque toujours de 3,000 à 5,000 chameaux. L’échelle de Damas est Beyruth ; la rade de Beyruth n’est pas bonne, mais en hiver les navires vont mouiller dans une rivière qui est à cinq lieues de là, et où ils sont en sûreté.

Abdullah, pacha de Saint-Jean-d’Acre, fait peser sur la Syrie un joug intolérable. Il avait reçu récemment l’ordre de la Porte de transporter à Seide le siége de son gouvernement, mais il est parvenu à faire changer cette décision, qui aurait pu cependant être favorable aux intérêts des populations, en facilitant à la Porte les moyens de se faire obéir dans ces contrées éloignées. Abdullah vient de frapper une contribution très-forte sur les provinces et tout le littoral dépendant de son administration, depuis Alexandrette jusqu’à Jaffa. Il a également imposé le mont Liban. Mais là son despotisme ne peut pénétrer, et il est forcé d’user d’une grande modération. Les populations du mont Liban sont sous le gouvernement d’un prince nommé Émir Beshir, qui dépend bien du pacha d’Acre, mais qui, par le fait, est indépendant. Ce seigneur féodal a à sa solde des troupes dont le nombre peut être évalué à 12 ou 15,000 hommes, troupes aguerries, naturellement belliqueuses, et qu’on ne peut guère espérer de vaincre dans ces montagnes où des assaillans auraient de si grands obstacles à surmonter. Émir Beshir peut d’ailleurs, avec la plus grande facilité, rassembler en peu de temps 40,000 hommes, gens déterminés à conserver leur indépendance et leurs institutions. Toutes les parties du mont Liban sont parfaitement cultivées, et les habitans y jouissent d’une assez grande aisance, par le seul effet de l’espèce de liberté qui y règne. Tout fugitif de la Syrie qui parvient à gagner le mont Liban y trouve un asile inviolable, d’où on ne tente jamais de l’arracher ; les