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LA GRÈCE EN 1829.

De plus, dans la circonstance actuelle, toutes les puissances étaient intéressées à ce que l’insurrection grecque n’anéantît pas le commerce de l’Orient. Elles pouvaient consentir à reconnaître le blocus pour les côtes de la Grèce, pourvu cependant que les Grecs le protégeassent par une force effective ; mais non à ce que, sous ce prétexte, ils infestassent de leurs courses les mers du Levant. L’Angleterre était dans une position différente des autres puissances : elle a toujours refusé de reconnaître les principes de blocus que j’ai rappelés plus haut ; et, puisqu’elle s’efforce de faire prévaloir les principes contraires, elle devait donc en permettre l’exercice aux Grecs, quoique ses intérêts s’en trouvassent momentanément blessés[1]. Les Grecs, à qui cette observation n’échappait point, s’enhardirent à pousser leurs courses bien au-delà des limites où elles auraient dû être restreintes. Ils essayèrent de visiter des bâtimens sous escorte anglaise : on le leur permit. Ils tentèrent alors les

  1. La station anglaise était alors commandée par le commodore Hamilton, dont les opinions philhelléniques étaient fort prononcées. On lui reproche avec raison d’avoir le plus contribué à donner cette hardiesse aux Grecs. Il était à Syra en 1825, lorsqu’une goëlette grecque, appartenant même à Fabvier, et commandée par un nommé Decroze, vint lui demander la permission de visiter un navire anglais, mouillé à côté de lui, et qui, disait-on, avait à bord des vivres destinés aux Turcs. Le commodore le permit ; le bâtiment fut visité, emmené à Égine et déclaré de bonne prise. On conçoit combien la réussite de cette tentative encouragea les Grecs. C’est à cette époque qu’on a vu la piraterie prendre son plus grand essor.