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HISTOIRE.

« Certes, c’est beau ; mais où est la mer ? Elle est loin d’ici ! »

Le patriotisme des Grecs modernes ne s’est malheureusement pas étendu jusque sur leurs monumens, dont la conservation leur est médiocrement à cœur. « L’homme abruti a toujours du plaisir quand il peut faire rouler dans l’abyme quelque grosse pierre antique, et je crois que ce phénomène peut s’expliquer par une observation psychologique. L’homme aime à se croire quelque chose et à se voir libre, à se sentir indépendant et surtout à agir par lui-même ; mais l’homme encore brut, qui manque à la fois de force morale pour se soumettre et de moyens pour agir, et qui, ne portant qu’à regret le joug de la civilisation, se trouve réduit à n’être que l’agent des volontés d’un autre, ce qui, au reste, est parfaitement en règle ; cet homme, dis-je, révolté de l’abaissement de sa destinée, cherche tous les moyens de s’y soustraire. Il porte tout naturellement en lui un désir de destruction, parce qu’enfin détruire, c’est agir, c’est faire un acte de volonté. Cet ignorant, ce barbare recouvre, à ce qu’il lui semble, un sentiment d’indépendance en faisant disparaître ces mêmes objets que révèrent des hommes placés plus haut que lui dans l’échelle de la civilisation, objets qu’il ne peut comprendre et encore moins créer ou façonner Voilà pourquoi les gouvernemens des peuples civilisés doivent veiller à la conservation des monumens de tout genre qui marquent les pas de l’esprit humain, et ceux surtout qui sont le plus exposés aux attaques de la barbarie ont