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DES GRECS MODERNES.

insulaires pour leur pays est surtout remarquable. Il faut en chercher la cause, non-seulement dans l’attachement ordinaire au sol natal, mais encore dans des circonstances locales, surtout dans l’influence qu’exerce depuis l’enfance sur le physique et le moral d’un peuple doué d’un naturel heureux, sensible et mobile, une mer superbe, remarquable par sa variété infinie, par la richesse des teintes, et par un horizon immense. L’exclamation de Callirhoé (Chariton, liv. v) est donc aussi vraie que pathétique, lorsque, sur le point d’être conduite dans l’intérieur de l’Asie et à Babylone, elle s’écrie : « On m’entraîne sur les bords de l’Euphrate, et, pauvre insulaire, on m’enferme au milieu de terres barbares, là où il n’y a pas de mer. »

« Certes, cette prédilection pour les rochers de la mer qui leur appartiennent, cet amour d’hommes spirituels robustes et vifs pour leurs foyers est un sentiment estimable, digne d’intérêt, satisfaisant à observer, parce qu’il limite leurs désirs, exclut l’envie de posséder le bien d’autrui, et ajoute au plaisir de la jouissance celui de la modération même qui y préside. Aussi les insulaires ont-ils bien raison de dire souvent que leur mer si belle leur tient lieu de beaucoup de choses. Un jour, pendant que j’admirais, sur les hauteurs d’Ampelakia, auprès de la vallée de Tempé, la beauté du paysage qui se présentait devant moi, les masses imposantes de l’Olympe et le fleuve qui en baignait le pied, un Grec de l’île de Tino qui était présent, me dit :