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MÉLANGES.

sur mes juges. Ils étaient impassibles et sérieux ; un silence de mort m’environnait. Dans l’impossibilité de tromper ces nombreux regards fixés sur moi, j’élevai une courte prière au Dieu des chrétiens, j’avalai le terrible breuvage, et je laissai tomber la coupe vide à mes pieds. Un murmure sourd et prolongé se fit entendre parmi la foule qui s’attendait à me voir expirer à l’instant, et qui s’ouvrit pour me laisser sortir en s’apercevant que je n’éprouvais aucun symptôme de mort prochaine. Rentré chez moi, je me hâtai de prendre un puissant vomitif, et j’eus le bonheur d’expectorer le poison en totalité. Mes esclaves me racontèrent qu’on le composait avec l’écorce d’un arbre très-abondant dans le pays, et que j’étais le premier individu qu’on se souvînt d’avoir vu échapper à ses funestes effets. Il avait une saveur amère, mais je n’éprouvai du reste que quelques vertiges qui se dissipèrent complétement deux ou trois heures après l’épreuve. »

Lander.