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HISTOIRE.

Cette digression m’a paru indispensable, parce que les mêmes observations se reproduisent à chaque pas dans la question actuelle. Je me bornerai dorénavant à y recourir, quand elles se présenteront de nouveau. Elles m’ont été inspirées par le premier sujet qui s’est offert, le souvenir qui me reste des montagnards grecs qu’on appelle indépendans. Ils détestent sans doute les Turcs, mais cette haine est commune à tous les Grecs et je ne vois point qu’elle leur ait inspiré des traits plus héroïques. Je n’ai point, à la vérité, assisté à leurs faits d’armes ; mais j’ai suivi leur histoire par leurs propres récits, par ceux d’une foule de témoins oculaires et impartiaux, et, qui mieux est, par ses résultats ; je m’en suis beaucoup plus rapporté à ces documens qu’à ce que j’en ai vu moi-même, quand je me suis trouvé dans leurs camps, lorsque j’en ai été entouré ; ce qui m’arrivait tous les jours pendant le temps que j’ai passé en Grèce. J’aurais craint, à ne consulter que les opinions du moment, de ne les avoir jugés que trop superficiellement et d’en tracer un portrait infidèle.

Ce que j’ai raconté de leur caractère suffit pour expliquer la part qu’ils ont prise dans la révolution actuelle. Cette révolution n’est aucunement venue d’eux : elle a pris naissance dans la masse du peuple, qui, opprimé par les Turcs, et plus encore par les primats qui servaient d’intermédiaires à ceux-ci, a voulu changer un ordre de choses qui la ruinait. Les bandits des montagnes ont dû se jeter avidement dans des troubles qui étaient tout-à-fait de leur goût, puisqu’ils leur promettaient du butin. Ils