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VOYAGE AUTOUR DU MONDE.

quans se faisaient sentir le soir et le matin, et la neige n’était point encore fondue sur les sommets des montagnes de l’intérieur. Tant que dura notre relâche, nous n’eûmes point un jour complétement serein. Lorsque le soleil brillait avec le plus de splendeur, des nuages chargés apparaissaient bientôt pour se résoudre en grains qui se partageaient l’horizon. Bien des fois, j’ai vu les collines rocailleuses voisines de la mer, dorées par les rayons du soleil couchant, tandis qu’à quelques pas, des nuées laissaient précipiter des torrens d’eau, en resserrant leurs ondées dans un étroit espace.

Bougainville se louait beaucoup des Malouines, sous le rapport de la salubrité. Notre relâche a été de trop courte durée pour que nous ayons à infirmer ou à valider cette opinion ; car nous en partîmes sans avoir de malades parmi les gens de l’équipage. Cependant les bancs épais de limon tourbeux encombrent les approches de plusieurs points de la baie, et surtout les rivages de l’île aux Loups-Marins. Cette vase, à laquelle se joignent des myriades de mollusques en putréfaction et les épaisses couches des fucus pyrifères en décomposition, exhalent une odeur d’une horrible fétidité, et tout autorise à penser que les miasmes qui s’en dégagent auraient les résultats les plus fâcheux sur des hommes qui seraient soumis à leur influence par un séjour constant. Ces changemens subits de la température devraient encore y faire éclore les affections inflammatoires de la poitrine et des phlegmasies variées et intenses.