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VOYAGE AUTOUR DU MONDE.

tout dépouillé, 177 kilogrammes, et ces derniers, 50. Les cochons n’ont pour se nourrir que les racines sucrées et les baies d’empetrum ; aussi leur chair est-elle maigre, et sans analogie pour la saveur avec celle des espèces domestiques d’Europe.

Depuis plusieurs jours, je désirais visiter les îles aux Loups-Marins et aux Pingoins, qui sont placées au milieu de la baie de la Soledad. La surface des Malouines, rase et dépourvue d’arbustes, fatigue par sa monotonie. Il n’en est pas de même de ces deux petits îlots, entièrement recouverts de hautes graminées, dont les tiges pressées imitent des bois taillis, qui trompèrent plus d’un navigateur, et les compagnons mêmes de Bougainville, lorsqu’ils vinrent s’établir dans ces climats. Ces gramens, à port de palmiers, sont désignés par Pernetty, dans la relation de son voyage, sous le nom de glayeuls. Ils forment des fourrées épaisses qui protègent les phoques à l’époque de leurs amours et les cavernes innombrables des manchots qui y vivent en république.

Quel être singulier que le manchot, dont l’existence tient et de l’oiseau et du poisson ? Ses ailes rudimentaires, ses moignons disposés en rames, s’opposent à ce qu’il puisse voler. Ses plumes soyeuses imitant des poils qu’un enduit huileux et vernissé recouvrent, protègent les chairs contre la macération à la suite d’un long séjour dans l’eau ; ses jambes, placées très en arrière du corps, le forcent à se tenir et à marcher droit. C’est par milliers