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VOYAGE AU JAPON.

et se retirait satisfait après avoir laissé un riche présent, il était à craindre que, quoique l’empereur me fît un accueil extraordinaire, et me comblât de grâces inconnues à ses sujets les plus favorisés, je ne fusse peut-être surpris de la sécheresse d’une réception que j’apprécierais d’après mes propres idées tandis qu’en réalité l’Empereur avait l’intention formelle de me traiter avec toute sorte de distinction. Conseconduno me fit comprendre qu’il avait traité cette question avec son maître.

Cette allocution me parut digne d’une réponse pesée mûrement dans toutes ses expressions. C’est pourquoi, après avoir réfléchi un moment, et ayant prévenu mon interprète, le père Jean-Baptiste, de la compagnie de Jésus, de bien expliquer le véritable sens de mes paroles, je répondis que j’avais écouté avec attention son beau discours ; que je le remerciais des renseignemens qu’il me donnait sur la grandeur de son maître ; mais que je ne pouvais en être surpris, étant sujet du roi Philippe, qui était bien plus puissant, puisqu’il était le plus grand des rois de l’univers, et en comparaison duquel tous les autres étaient des nains. Je parlai quelque temps sur ce ton, et j’appuyai mes raisonnemens aussi bien que je le pus. Je convins qu’en effet, la majesté des rois ne devait jamais se relâcher en rien à l’égard de leurs propres sujets ; mais que, vis-à-vis de ceux qui ne l’étaient point, la bonne raison d’état voulait qu’ils se montrassent affables et clémens ; qu’envoyé par mon roi pour gou-