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TABLEAU DE L’ÉGYPTE ET DE LA NUBIE.

les parfums de l’Inde, les tissus de Cachemire et les produits de l’Europe. Les marchands qui la fréquentent m’ont paru beaucoup plus nombreux que ceux qui se réunissent à Beaucaire : les baraques construites sur deux rangs, s’étendent dans la plaine sur une longueur de quatre lieues. Presque toute l’Égypte vient à la foire de Tantah, et le caractère particulier qu’elle doit à l’affluence des femmes, provient de ce que le penchant des Égyptiennes à la galanterie, contrarié constamment partout ailleurs, se satisfait librement ici sous la sauvegarde de la religion. Les femmes qui tardent trop à avoir des enfans, ou qui sont menacées de stérilité, demandent ordinairement à leurs maris la permission d’aller à Tantah faire des prières à Saïd le Bédouin. Le mari ne peut refuser ; la femme se met route, accompagnée de son père, ou de sa mère, ou de quelque voisine vouée au même pélerinage. Arrivées au terme du voyage, elles commencent par faire dresser leur tente, puis elles vont à la mosquée lire le fata (la prière), sur le tombeau de Saïd. Le séjour d’un mois à Tantah, l’entremise du saint patron et celle de quelques domestiques affidés, concourent à la réussite du pélerinage ; presque toutes reviennent enceintes, et montrent par leur empressement et leurs caresses, sinon le plaisir de revoir leurs maris, du moins la satisfaction qui leur est restée du voyage.

» Saïd le Bédouin fait plus que de consoler les femmes négligées ; il guérit aussi beaucoup d’infirmités et de maladies. Non loin de là se trouve un