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GRANDE-BRETAGNE.

de l’aisance comparative des classes supérieures, de l’augmentation effrayante de la dette nationale par suite des guerres d’Amérique et de France, du surcroît de contributions qu’elles ont nécessité, et dont tout le poids retombe sur la classe qui renferme le plus grand nombre de consommateurs. Si l’on veut avoir une idée exacte de l’efficacité de la taxe des pauvres, il faut prendre pour base ses rapports avec le revenu annuel du pays. En 1688, le revenu de l’État était de 30,000,000 sterling, et la taxe des pauvres de deux millions, c’est-à-dire dans la proportion de 15 à 1. En 1811, le revenu s’élevait à 300 millions sterling, et la taxe des pauvres à 8, ce qui donnait un rapport de 32 à 1.

Nos adversaires prétendent encore qu’un fonds pour les pauvres ruine l’industrie ; et cependant que dit l’acte d’Élisabeth ? « Faites travailler le peuple ou nourrissez-le, comme consommateur de votre propriété. » C’est donc une taxe sur l’indolence et l’avarice. L’industrie a porté a 500 millions sterling le revenu national de l’Angleterre. En Irlande, où cette industrie n’existe pas, la moitié des habitans est sans ouvrage et réduite à un dénuement complet. Ils vivent d’alimens grossiers qu’ils obtiennent le plus souvent de la charité publique, et leur vie licencieuse engendre des habitudes, des sentimens et des vices incompatibles avec le bien-être de la société.

Le soin de sa propre conservation est la première loi de la nature. En admettant ce principe, M. Malthus peut-il réellement croire que les personnes et les propriétés se trouvent en sureté au milieu d’une population mourant de faim ? Encore une fois, le remède le plus efficace et le plus immédiate en Irlande contre l’absentisme[1], serait un fonds public destiné à donner du travail au peuple. Cette mesure lui inspirerait le sen-

  1. C’est ainsi qu’on appelle l’habitude d’émigrer que l’on remarque chez les Irlandais, et surtout parmi les classes riches.