Page:Revue des Deux Mondes - 1829 - tome 2.djvu/345

Cette page a été validée par deux contributeurs.
335
DES POSSESSIONS ASIATIQUES AU-DELÀ DU CAUCASE.

ce qu’il lui faut, c’est de l’or et du soleil. Mais à l’Orient de l’isthme caucasien, derrière les déserts de la Perse et le royaume des Afghans, à une distance considérable sans doute, mais que la conquête diminue chaque jour, il est une terre riche et fertile, un de ces climats du midi vers lesquels un instinct de butin et de gloire pousse incessamment les hommes du nord, l’Hindoustan. Fécondité du sol, commerce florissant, population docile au joug, tous les avantages que peut ambitionner la Russie, se rencontrent dans la possession de ce pays. Certes il y a là de quoi dédommager des frais et des périls de cette aventureuse entreprise. L’Inde vaut bien quelques millions de roubles, et quelques milliers de soldats. L’Angleterre elle-même lui a facilité les voies par ses imprudences ; sa cupidité mercantile, en l’excitant à étendre de plus en plus sa domination sur l’occident de l’Inde, l’a rapprochée de son terrible adversaire ; et le despotisme de ses agens a semé dans l’ame des chefs nationaux, des ressentimens qui n’attendent peut-être pour éclater que des circonstances favorables. Ces circonstances, la Russie les fera naître : les documens déjà publiés dans ce recueil ne laissent guère de doute sur ses intentions ultérieures à cet égard.

Il reste maintenant à savoir quelle route conduira les armées russes au milieu des comptoirs de l’Inde britannique, et si la guerre viendra d’Erivan, de Bakou ou d’Orembourg, en d’autres termes : les Russes traverseront-ils la Perse ou la Boukharie, et dans cette dernière hypothèse, s’introduiront-ils en Boukharie par la mer Caspienne ou les steppes des Kirghis[1] ?

On a cru long-temps en Europe que la conquête de la Perse était la condition préalable et nécessaire d’une invasion dans

  1. On sait que dans les dernières années de son règne, l’empereur Alexandre a reçu à Orembourg la soumission de la plupart des chefs de cette partie de la Tartarie.