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BIOGRAPHIE. — JEFFERSON.

bonheur et la prospérité de l’Amérique du nord. Il abolit les droits intérieurs, rapporta la loi contre les étrangers, qu’il déclara incompatible avec les véritables intérêts de l’Union, admit les principes les plus libéraux dans les relations commerciales avec les puissances étrangères, réduisit les dépenses de l’état, et acquitta 33 millions et demi de la dette publique. Sous son administration, les États-Unis firent acquisition de la Louisiane ; tout le continent de l’Amérique septentrionale fut exploré, par Lewis et Clarke, jusqu’à l’Océan pacifique ; le major Pike visita les sources du Mississipi et de l’Arkansas ; le colonel Freeman remonta le cours de la rivière Rouge et les voyageurs Hunter et Dunbar reconnurent les bords de la Washita. C’est aussi à Jefferson que la république doit la fondation de la célèbre académie militaire de Westpoint. Les indigènes trouvèrent en lui un ami et un protecteur. Les Cherokées surtout furent l’objet constant de sa sollicitude, et les progrès qu’ils ont faits dans les arts de la vie civilisée sont en grande partie son ouvrage.

À l’expiration de sa seconde présidence, Jefferson se retira sur sa plantation de Monticello, où il reprit ses occupations et ses études favorites. Ses loisirs cependant ne furent point perdus pour son pays. Il les consacra à la fondation de l’université de Virginie, qui est aujourd’hui une des plus célèbres de l’Union. Mais cette vie si belle, si glorieuse et si utile à sa patrie fut empoisonnée sur son déclin par des soucis qu’il chercha à dérober à la connaissance de ses compatriotes. Sa longue carrière politique, qui l’avait constamment empêché de vaquer à ses affaires privées, la modicité des honoraires attachés aux fonctions publiques qu’il avait remplies, l’obligation où elles le mettaient d’exercer une hospitalité dispendieuse, et des malheurs imprévus, avaient tellement dérangé sa fortune, que dans ses vieux jours, le spectre hideux de la pauvreté, pour nous servir de l’expression d’un de ses biographes, vint s’asseoir à son foyer domestique. Jefferson était même sur le point de se voir priver par d’avides créanciers des seuls moyens d’existence qui lui restaient, lorsque la mort l’enleva le 4 juillet 1826, cinquantième anniversaire de l’indépendance, dans la quatre-vingt-quatrième année de son âge.

Jefferson était versé dans l’histoire et les langues anciennes et modernes, l’économie politique, les mathématiques, la chimie, la physique, l’astronomie, les arts mécaniques, et tous les genres de littérature. Il était membre de l’Institut de France et des principales sociétés savantes des États-Unis.