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POLYNÉSIE.

tous leurs doutes furent dissipés ; ils restèrent convaincus que les tristes débris qui frappaient leurs yeux étaient les derniers témoins du désastre des navires de La Pérouse.

M. Jacquinot tenta vainement de soulever une des ancres avec le grand canot ; mais les coraux qui depuis quarante ans travaillaient tout à l’entour, l’avaient fixée avec tant de force au fond, qu’on eût démoli le canot sans venir à bout de ce projet. Comme je tenais à remporter avec nous en Europe quelqu’un des précieux débris que nous venions de découvrir, je me décidai à renvoyer la chaloupe elle-même sur les récifs pour les en détacher.

Je voulus mouiller la corvette dans un lieu plus sûr. Il me fallut pour cela la faire passer par un canal étroit, obstrué de coraux et sur les bords duquel la mer brisait avec fureur. Cette manœuvre périlleuse nous coûta deux journées entières des travaux les plus pénibles ; ce ne fut que le 2 mars au soir, que nous nous vîmes enfin mouillés dans un bassin entouré de terres de tous côtés, à l’abri des vents et de la mer.

Dès le lendemain, à trois heures et demie, la chaloupe et un autre canot furent expédiés sous les ordres de MM. Gressieu et Guilbert. Le premier était chargé de lever le plan des récifs et de terminer celui de l’île ; le second devait recueillir tout ce qu’il pourrait des débris du naufrage. Ces deux officiers restèrent deux jours entiers absens du bord ; et malgré le temps qui les contraria, ils remplirent complétement leur mission. M. Gressieu termina le plan détaillé de Vanikoro ; M. Guilbert, après de violens efforts qui firent céder l’arrière de la chaloupe, réussit à se procurer une ancre de 1800 k., un canon en fonte du calibre de huit, quelques pierriers, des boulets, des saumons, des plaques de plomb, etc., etc.

Tous mes compagnons paraissaient désormais aussi bien convaincus que moi du sort funeste des frégates de M. La Pérouse ; je leur communiquai le projet que j’avais conçu, d’élever à la mémoire de nos infortunés compatriotes un mo-