Page:Revue des Deux Mondes - 1829 - tome 2.djvu/217

Cette page a été validée par deux contributeurs.
MÉMOIRES DE L’EMPEREUR DJIHÂN-GUIR.

départit jamais, bien qu’il se plût quelquefois, dans ses entretiens particuliers avec les pundits (prêtres indous,) à les embarrasser sur les objets de leur culte, et à combattre leurs erreurs. « Dans une conversation, dit-il, que j’eus un soir avec quelques pundits, j’en pris occasion de leur demander s’il pouvait y avoir une absurdité plus grande que celle de prétendre représenter la nature ou l’existence de la Divinité avec des images, puisque nous savions tous que l’Être suprême existe de toute éternité ; qu’il est exempt de changement et de destruction ; qu’il n’a ni longueur ni largeur, et que par conséquent il doit être invisible. Comment donc pouvait-il être possible de lui donner une forme sous les traits imparfaits d’une créature humaine ? Si d’un autre côté, continuai-je, vous voulez exprimer de cette manière la manifestation de la lumière divine dans les corps, nous savions déjà que la puissance de la Divinité pénètre tout ce qui existe ; ceci fut annoncé au législateur d’Israël du milieu du buisson ardent. Si vous voulez retracer par affinité quelques-uns des attributs du Tout-Puissant, on doit encore reconnaître que sous ces images, il ne peut réellement en exister aucune… Mais si, au contraire, vous considérez ces figures comme des objets immédiats d’adoration, et comme la source dont vous espérez appui et assistance, vos hommages alors ne sont que le produit de la crainte, puisque l’adoration n’est due qu’à Dieu, qui n’a ni égal ni allié. Après divers argumens pour et contre, les plus intelligens de ces pundits parurent convaincus de la faiblesse de leur cause, et m’avouèrent enfin que sans l’intervention de ces images, il leur était impossible de fixer leur esprit d’une manière positive dans la contemplation des perfections de l’Être suprême. »

(La suite à la prochaine livraison)