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TURQUIE.

Candie, 4 janvier 1829.
« Monsieur le commandant,

» J’ai reçu les deux lettres que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire, sous les dates du 28 décembre 1828, de la baie de la Sude, et du 2 janvier 1829 de celle de Candie.

» Permettez-moi, monsieur le commandant, de commencer ma réponse par la seconde de ces lettres, et de vous exprimer d’une faible manière la reconnaissance que votre humanité s’est acquise dans mon cœur, ainsi que dans celui des deux cent onze victimes qui doivent leur salut à votre générosité.

» Dans votre lettre du 28 décembre, vous témoignez la peine que vous avez éprouvée, monsieur le commandant, en voyant les Grecs, roidis contre le langage de la raison, vous forcer à retirer votre bras conciliateur des conférences de Saint-Elefteri. Cette peine, je la ressens mieux encore moi-même dans ma situation ; cependant je suis heureux que ces scènes de désordre se soient passées sous vos yeux.

» M. Caporal, à son retour du second voyage de la Sude, m’a fait connaître que les Grecs désignaient les Turcs comme agresseurs dans la rixe de Pidia. Rien de plus faux que cette accusation, monsieur le commandant ! Turcs et Grecs étaient tranquilles, les premiers sincères, les seconds feignant d’attendre les avantages de l’armistice, mais dans le fond méditant l’invasion. Les Grecs alors se sont jetés tout-à-coup sur Scitia, où ils ont enlevé quarante mille moutons, tué vingt-six hommes et fait esclaves vingt femmes et enfans. Les musulmans à leur tour ont tué alors huit hommes, et pris vingt femmes et enfans qu’ils m’ont envoyés, avec la prière de les