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RUSSIE.

Montereau, on put juger que la cause de leur souverain se trouvait désespérée. L’empereur Nicolas revint bientôt d’Odessa, et le siége de Varna fut poussé avec plus de vigueur ; mais le courage des assiégés s’accrut avec le danger. Ils avaient à leur tête un homme intrépide qui avait juré de se défendre jusqu’à la dernière extrémité. Cet homme était le grand amiral Kutchuk Mehemmed-Pacha. Toujours présent où le devoir l’appelait, sur la terre comme sur les flots, le pacha dirigeait toutes les sorties, repoussait tous les assauts, réparait toutes les brèches. Tandis que des privations de tout genre accablaient le soldat russe, de hardis marins, bravant la flotte de Greigh, apportaient au grand amiral les vivres et les munitions qui lui manquaient. Il sut, pendant trois mois, pourvoir aux besoins d’une population de plus de 30 mille ames, exalter à la fois l’enthousiasme religieux de ses troupes, et maintenir la sécurité parmi les nombreux chrétiens de Varna.

Ainsi, devant Varna comme devant Chumla, la même fatalité poursuivit les armes russes. Hussein-Pacha, plus tranquille de son côté, avait pu détacher quelques troupes au secours de la ville assiégée, et le pacha de Salonique, Omer-Vrione, traversant le Balkan, venait de paraître sur les bords du Khamtchi. Un combat général s’engagea sur toute la ligne. Les Russes pénétrèrent jusque dans les rues de Varna ; mais ils en furent bientôt repoussés. Vers un autre point, un régiment de la garde envoyé en reconnaissance périt tout entier. Freitag et plusieurs officiers supérieurs tombèrent morts au premier rang, et d’une masse de trois mille hommes, il n’en resta que cent cinquante pour attester ce nouveau désastre.

On parlait de lever le siége ; les Russes allaient quitter la Bulgarie, sans avoir même un trophée à montrer sur la rive droite du Danube. Étonné de la résistance inattendue des Turcs, obligé même de veiller à sa défense personnelle au