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soin des graveurs. Plus tard, M. Gardner a fait observer, en attachant beaucoup de poids à cette remarque[1], que les formes particulières en question (sigma couché, Σ, epsilon couché, E, my affectant la forme de l’N) se rencontreraient réunies dans les mêmes textes. Cela est absolument exact dans le cas des deux graffites Naucratis I, pl. xxxii, nos 1 b et 3 ; mais, dans le n° 4 de la même planche, la forme archaïque du Σ[2], telle qu’on la trouve dans le n° 3, n’est pas couchée, mais debout, et la forme du M ne me paraît pas tout à fait assurée. Les nos 68, 73 (?), 81, 135, 254, que M. E. Gardner range dans la même série à cause du N couché qui y figure, présentent des Σ absolument réguliers.

M. E. Gardner ajoute que les circonstances de la découverte et la technique des vases autorisent à leur attribuer une date très ancienne. À toute cette argumentation, je dois encore opposer la même réponse : l’inscription n° 305, qui présente un sigma et un epsilon couchés, plus un my de forme très singulière, est gravée sur un vase (« eye-bowl ») que M. Gardner lui-même considère comme plus récent que les autres ; des formes analogues apparaissent isolément dans d’autres graffites, les nos 112 et 113, que M. Gardner ne range cependant que dans la neuvième classe, et aussi dans la remarquable inscription n° 348, dont M. Gardner ne me paraît nulle part avoir tenu compte.

La question se présentant ainsi, nous ne nous trouvâmes nullement porté à mettre en doute la date donnée par Hérodote et nous ne cessâmes point de considérer les graffites d’Abou-Simboul comme représentant le stade le plus archaïque de l’écriture ionienne.

Les savants anglais, en particulier M. Petrie, ont surtout fait valoir une trouvaille de scarabées pour faire remonter la colonisation grecque de Naucratis à une époque plus ancienne que celle d’Amasis[3]. Les cartouches de ces scarabées forment une série qui s’interrompt avant Amasis, et cependant les inscriptions et les gravures qu’ils portent laissent reconnaître des incorrections qui trahiraient la main d’ouvriers grecs. Mais pourquoi ces graveurs

  1. M. E. Gardner, Naucratis, t. II, p. 73.
  2. C’est un Σ très analogue à celui de l’inscription de Sigée.
  3. Naucratis, I, p. 5.