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emboîté dans sa selle, solidement appuyé sur les étriers, peut désormais, la lance sous le bras, se précipiter sur l’ennemi et user du poids et de la vitesse de son cheval pour le choc : c’est la charge véritable.

Cette tactique nouvelle dure jusqu’au xvie siècle, où le prestige des armes à feu, joint à quelques autres circonstances, la fait abandonner pour le « caracol », tactique dans laquelle la cavalerie n’use plus que du pistolet. Malgré les efforts de quelques grands capitaines, ce n’est qu’à la fin du xviiie siècle que l’on revient à la pratique de la charge. Mais au xix les progrès constants des armes à feu réduisent de plus en plus le rôle de la cavalerie sur le champ de bataille, où l’auteur juge qu’elle pourra encore faire office d’infanterie montée. Le cheval de bataille a vécu.

Cette analyse sommaire est, en outre, incomplète : j’ai omis tout ce qui concerne l’Inde, l’Extrême-Orient, l’Amérique, l’équitation féminine. J’ai omis, surtout, un certain nombre de détails spécialement intéressants et notamment les passages où l’auteur explique maint endroit des auteurs anciens, rectifiant au passage de vieilles et tenaces erreurs : sur les prétendues charges de la cavalerie d’Alexandre ou des cataphractaires sarmates, sassanides ou romains.

Il faut signaler aussi l’explication relative aux cavaliers numides, qui montaient « sans frein ». Or, en effet, ils n’avaient pas de mors, ni de frein ordinaire, mais ils entouraient l’encolure du cheval d’une courroie qui servait de frein. Et cette méthode, réinventée par hasard au camp de Vincennes en 1885, donna des résultats satisfaisants. Voilà un curieux mystère définitivement éclairci.

À noter encore la date attribuée à la tapisserie de Bayeux : d’après l’examen des armes et du harnachement, il faudrait en placer l’exécution non pas au xie, mais au xiie siècle.

Ces quelques exemples indiquent, dans une certaine mesure, l’intérêt de l’ouvrage ; ils montrent aussi l’excellence de la méthode suivie, méthode à la fois simple, et scientifique en ce qu’elle consiste dans la collation, l’examen, la confrontation d’un nombre considérable de monuments antiques et de ce qui reste des historiens grecs et romains.

À peine peut-on, semble-t-il, relever quelques rares omissions. J’aurais souhaité que l’auteur remarquât la selle des cavaliers figurés sur le mausolée de Saint-Rémy-de-Provence et aussi l’objet considéré comme selle sur l’un des trophées de l’arc d’Orange. Il eût été bon d’indiquer que la date du trophée d’Adam-Clissi (fig. 251) et son attribution à Trajan est contestée (avec raison). Je ne crois pas non plus qu’on puisse taxer d’inexactitude les figurations des monuments grecs (p. 203), dont certains détails, omis par le sculpteur, étaient vraisemblablement indiqués par la peinture.