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de dégager aussi ce qui appartient à la plus haute, à la plus libre vie de l’esprit — de l’esprit affranchi de la tyrannie pesante des forces économiques, des forces matérielles, des forces inconscientes ? Quel est, en d’autres termes, dans la France du XVIe siècle, le rôle exact joué par les classes, la place tenue par elles en face de celle qu’occupent les grandes et hautes individualités dont l’action apparaît plus ou moins libérée des servitudes et des contraintes économiques et collectives ? Et ces individus eux-mêmes, dans quelle mesure reflètent-ils la pensée des grands groupements d’ensemble dont ils peuvent apparaître tantôt comme les représentants, tantôt comme les adversaires ? Il n’est pas de problème plus intéressant je ne dis pas à résoudre : nos ambitions doivent savoir attendre — mais du moins à poser.


IV

Dois-je m’excuser maintenant d’avoir fait précéder de cette longue préface théorique et dogmatique ce qui sera l’objet propre du cours de cette année ? Au fond, je me sens très porté à m’absoudre moi-même de l’avoir rédigée. Car je ne suis pas de ceux qui estiment que, pour aller vite et sûrement en terrain inconnu, il faut surtout bien se garder de perdre deux minutes à chercher une boussole.

L’histoire telle que je la conçois et que je m’efforcerai de la promouvoir et de la pratiquer ici, vous en voyez nettement, j’imagine, les traits caractéristiques.

Dans ses procédés, elle est essentiellement analytique. Non qu’à la synthèse elle entende dénier ses droits. Mais il faut commencer par le commencement et, avant de conduire par ordre ses pensées en commençant par les objets les plus simples et les plus aisés à connaître, pour s’élever peu à peu, comme par degrés, à la connaissance des plus composés — il faut d’abord connaître et saisir ces objets les plus simples et les plus aisés à connaître ; il faut commencer, en d’autres termes — et ces termes sont toujours cartésiens — par décomposer chacune des difficultés (disons, nous, chacun des complexes de faits historiques) en autant de parties qu’il se peut et qu’il est requis pour les mieux résoudre.

Analytique dans ses procédés, notre histoire n’est ni collectiviste, ni individualiste — puisque tout son effort tend, non pas à nier