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est de ne les employer qu’au sens rigoureux où la science positive les emploie. Puis viennent d’autres termes, moins définis, mais au sujet desquels il paraît qu’il serait possible encore d écarter l’équivoque. Soit, par exemple, le terme d’évolution, qui vient de soulever une discussion : M. Weber l’employait au sens large, M. Bergson au sens étroit. Pourquoi ne pas distinguer les deux concepts d’évolution et de révolution, subsumés l’un et l’autre sous le concept plus général de devenir. Mais le mot entraîne encore une autre équivoque. Il peut signifier la série totale des transformations d’un être de la naissance à la mort, le progrès, puis la décadence, tandis que, dans cette série totale de transformations, M. Spencer distingue entre l’évolution proprement dite et la dissolution : ne conviendrait-il pas d’appeler cursus l’ensemble des phénomènes, évolution le processus d’accroissement, dissolution le processus inverse ? Soit encore le terme de Nature. Stuart Mill a bien analysé les significations diverses que présente le mot. La nature, c’est tantôt l’univers, tantôt ce qui, dans l’univers, s’oppose à ce qui est créé artificiellement par l’homme. De l’emploi alternatif du mot dans l’un et l’autre sens, résulte, entre beaucoup d’autres, le sophisme anarchiste. Des analyses semblables seraient possibles pour les mots de cause, de bonheur, de nécessité, de liberté, de réalité. Un pareil travail ne supprimerait pas les divergences de doctrine, il les définirait ; il laisserait de côté la philosophie qui se fait ; mais, à côté de la philosophie qui se fait, il y a une philosophie déjà faite. D’ailleurs, une fois les termes définis, il restera toujours au philosophe le nombre infini des combinaisons possibles des termes. — M. Lalande passe alors aux conclusions pratiques de son mémoire. Les travaux de M. Eucken, de M. Tönnies, des ouvrages tels que le lexique de M. Alexis Bertrand, ou que le dictionnaire de M. Eisler, prouvent que la question est en voie d’aboutir. Une tentative analogue est en voie d’exécution en France. M. Lalande propose la formation d’une société de travail collectif, ou plus exactement l’adoption d’un projet qui a reçu déjà l’approbation d’un certain nombre de philosophes français : M. Lalande cite les noms de MM. Boutroux, Brochard, Bergson, Andler, Egger, Belot, Delbos, Goblot, etc. Il s’adresse à ses collègues étrangers, les priant de former à l’étranger des sociétés analogues : ce sera le meilleur moyen de prolonger le Congrès. Et M. Lalande passe la parole à M. Ivanovski, qui veut précisément entretenir les membres du Congrès d’un projet de ce genre.