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REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

modale, de s’exprimer eu attributs, c’est-à-dire que son indétermination n’est pas négative, abstraite, mais positive, qu’elle est une réalité absolue, inépuisable, qu’elle est la prédicabilité absolue.

C’est le second sens auquel la substance est infinie. Nous verrons tout à l’heure qu’elle l’est encore à un troisième : au sens de l’absolue modificabilité.

Ainsi chacun des degrés de son abstraction, modificabilité absolue, prédicabilité absolue, substantialité pure ou absolue, Spinoza le caractérise, en le descendant, par le terme d’infini auquel il fait toujours signifier la même chose, savoir qu’il est absolu, qu’il ne relève de rien que de lui-même, exprimant une propriété de l’être qui ne saurait être expliquée par autre chose, par le dehors.

Autrement dit, chacun des degrés de son abstraction a évidemment pour nous sa base empirique dans le précédent ou inférieur ; celui-ci est pour nous la condition, au moins subjective, de celui-là. Spinoza se plaçant au point de vue opposé, dans l’être en soi, par soi, et pur, selon lui condition première de la pensée et de tout objet de la pensée ou de toute réalité, ce qui est équivalent à ses yeux, partant de la liaison absolue de l’être en soi et par soi avec la pensée, est obligé d’expliquer chacun des degrés inférieurs comme une manifestation ou réalisation absolue du supérieur, absolument indépendante du plus inférieur. C’est ce que signifie le terme d’infini. Il traduit simplement le caractère déductif du système, sa répudiation de tout empirisme en dépit de l’admission de toute l’expérience. Il démarque pour ainsi dire cette origine et exprime la pensée de Spinoza supprimant les limites empiriques, accidentelles du fait, lui retirant en un mot son caractère empirique et y voyant une nécessité ou réalité absolue. C’est la déclaration du caractère absolu du fait en dépit de son origine au point de vue subjectif. Cela est vrai même du fait proprement dit ou mode, dont la nature est d’être déterminé, conditionné par un autre mode ; car il faut distinguer entre sa nature absolue comme manifestation de la modificabilité absolue ( infinie) et sa nature relative ou particulière, autrement dit quantitative, par laquelle il est partie circonscrite du tout modal de l’attribut. Le tout modal est donc infini en deux sens, au sens établi plus haut, d’absolu, et au sens quantitatif, numérique. L’attribut possède la modificabilité absolue : tout mode l’exprime, et comme tel a une essence infinie, est inhérent à la substance. En outre cette modificabilité s’exprime en un nombre indéfini, inassignable, de modes solidaires,