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J. LAGNEAU.QUELQUES NOTES SUR SPINOZA.

autrement, directement, tout comme la connaissance rationnelle peut être atteinte sans passer par l’expérience, quoique l’expérience en soit la voie naturelle. Le dédain que Spinoza professe pour la connaissance sensible, il est certain que l’homme de morale et de religion le professe pour la connaissance pure. Il est certain aussi qu’il y a deux manières d’obtenir la vertu, directement, naturellement, ou intellectuellement, comme terme et fleur d’une vie vouée à la connaissance (vertu du penseur).

Laquelle est naturelle ? N’est-ce pas celle qui n’est pas rationnelle, la vertu d’imagination, d’entraînement ? Spinoza la déclare nécessaire, mais dans l’intérieur de l’individu. Pourquoi pas d’individu, de mode à mode, c’est-à-dire imaginatif ?

Alors l’imagination aurait un rôle rationnel ; ses conceptions, dont Spinoza ne fait pas la théorie comme étant sans valeur par elles-mêmes, en auraient une, auraient un principe présidant à leur construction dans chaque individu, le principe moral de l’accord désirable de tous les modes (beauté). Dans l’imagination se trouverait donc cet intérêt qui nous fait sortir de nous-même, qui nous émancipe de l’objet extérieur, de l’être, c’est-à-dire de l’égoïsme. Αγαθος ην. De là la création (passage des attributs aux modes).

Manque absolu d’une théorie de la perception et de la sensation dans Spinoza.

Spinoza supprime ou plutôt néglige la vraie existence, imaginative. C’est le mysticisme sémitique, abstrait. Là est son point de jonction avec Descartes, le rapport du judaïsme avec la science (voir la brochure de Darmesteter, race iconoclaste, anti-esthétique, moderne, anti-grecque et anti-aryenne).

2° La deuxième prise que Spinoza nous donne est sur cette question de la lettre LXXI à L.M.

Immoralité de Spinoza. Il contient bien toute la matière de la vie morale, mais il y manque l’idée morale même, l’obligation. Spinoza propose un modèle de la nature humaine (voir fin de la préface de la IVe partie), mais entièrement facultatif. La vie morale et définitive dans son système n’est qu’une dépendance toute relative à nous.

Pour Spinoza le sage seul jouit de l’éternité, c’est-à-dire du