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sciences. Du moins les premiers n’ont envisagé que quelques problèmes spéciaux. Tannery, dans ses notes variées, si instructives fussent-elles, n’a pas songé non plus à parler, en un seul chapitre complet, d’une œuvre déterminée de Descartes. Et, quant à Montucla, outre que ses informations sont éparses dans son grand ouvrage, et qu’il faut les y chercher comme en un dictionnaire, il n’avait pas à sa disposition les moyens de travail que nous pouvons utiliser aujourd’hui[1].

Je ne crois donc pas faire œuvre inutile ou vaine en publiant cette série d’études. Elles n’épuisent pas le sujet. En particulier, le lecteur trouvera ici peu de réflexions sur les caractères généraux de la Physique cartésienne, sur la théorie des Tourbillons, sur le Mécanisme cartésien, sur l’extension systématique de ce mécanisme à la biologie. C’est que vraiment, en ce qui concerne ces conceptions générales, il m’a semblé que tout ce qui peut être ajouté d’intéressant, sous forme de commentaire, aux pages mêmes de Descartes, a été dit et redit cent fois… Je me suis borné à élucider les points les plus obscurs, ou tout ou moins ceux sur lesquels une mise au point, sinon une appréciation nouvelle, était nécessaire, et je me suis attaché aux problèmes par lesquels Descartes pourrait le plus légitimement, quoi qu’il en eût pensé lui-même, réclamer une place fort honorable dans les progrès effectifs des sciences positives. Enfin, si je me suis préoccupé du lien qui relie ses travaux à sa pensée intégrale, j’ai eu à cœur de marquer aussi leur étroit rattachement aux efforts de ses prédécesseurs et de ses contemporains.

J’ai à peine besoin de dire avec quel profit j’ai utilisé la Grande Édition d’Adam et Tannery, et toutes les notes et tous les commentaires dont elle est pleine, en particulier le Journal de Beeckmann, si riche en informations. Mais j’ai tâché aussi et surtout de comprendre Descartes lui-même, soit dans les textes publiés par lui, soit dans les écrits posthumes, soit dans sa Correspondance. Et si quelque nuance est à signaler dans ma manière de procéder ici, comparée à

  1. Je ne parle pas des beaux livres de Liard et de Hamelin, parce que, quoiqu’ils aient touché l’un et l’autre, et de la façon la plus intelligente, aux travaux scientifiques de Descartes, ils n’ont pas eu la prétention d’analyser l’œuvre, ni dans son ensemble, ni dans ses détails. Ils se sont bornés à envisager quelques-unes des grandes lignes, et ont voulu surtout marquer la place de la Mathématique ou de la Physique cartésienne dans le système intégral de la pensée du philosophe. [Note de G. Milhaud.]