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Les corps insécables et pleins, dont sont formés et dans lesquels se résolvent les composés, présentent un nombre de formes différentes trop grand pour que nous puissions le saisir : car le nombre prodigieux des formes différentes offertes par les composés ne peut pas provenir d’un nombre concevable de formes élémentaires toujours les mêmes. De plus, chaque sorte de forme comporte un nombre infini d’exemplaires ; mais, envisagées quant à leurs différences, les formes ne sont pas en nombre absolument infini : elles dépassent seulement tout nombre concevable, (43) à moins qu’on ne s’avise de considérer les grandeurs des atomes comme pouvant aller à l’infini. Ajoutons que les atomes sont, depuis l’éternité, dans un mouvement perpétuel. Les uns dans leur mouvement laissent subsister entre eux de très grandes distances ; les autres, au contraire, gardent là même leur vibration, s’ils se trouvent pris dans un enchevêtrement ou enveloppés par des atomes enchevêtrés. (44) Et en effet, ce résultat provient d’abord du vide qui, au sein même des composés, isole en lui-même chacun des atomes, faisant ainsi que rien n’appuie sur chacun des atomes pour l’immobiliser ; puis, d’autre part, la solidité qui appartient aux atomes fait qu’ils rebondissent après le choc, autant du moins que leur enveloppement par le composé leur permet de reprendre, à la suite du choc, leur position primitive. Il n’y a pas de commencement à ces mouvements, parce que les atomes et le vide sont éternels.

(45) Voilà assez de paroles, à la condition qu’on se souvienne de tout ce que nous avons dit, pour donner à toutes les pensées sur la nature des êtres substantiels un moule suffisant.

Ce n’est pas seulement le nombre des atomes, c’est celui des mondes qui est infini dans l’univers. Il y a un nombre infini de mondes semblables au nôtre et un nombre infini de mondes différents. En effet puisque les atomes sont en nombre infini, comme nous l’avons dit tout à l’heure, il y en a partout, leur mouvement les portant même jusque dans les lieux les plus éloignés. Et d’autre part, toujours en vertu de cette infinité en nombre, la quantité d’atomes propres à servir d’éléments, ou, autrement dit, de causes, à un monde, ne peut être épuisée par la constitution d’un monde