Page:Revue de métaphysique et de morale - 13.djvu/667

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
657
G. LANSON.Droit du père de famille et droit de l’enfant.

sentimentales à ses enfants. C’est qu’il ne prétende pas leur inoculer autoritairement la toi à des dogmes qui ne sont pas ceux du père et que le père repousse. M. Brunetière a parfaitement raison sur ce point. Il y aurait tyrannie si la loi, comme sous l’ancien régime, geait des maîtres la profession de la religion catholique, et n’admettait que des écoles catholiques : il y aurait tyrannie si la profession catholique était pour un maître une cause d’exclusion, si la loi ne reconnaissait la capacité d’enseigner qu’aux libres penseurs, et si l’école se faisait confessionnelle au profit d’une irréligion doctrinale. Mais si la loi établit des distinctions entre les catholiques, si, pour des raisons que je n’ai pas à discuter ici, elle relire à certains catholiques, aux congréganistes, même à tous les prêtres, le droit d’enseigner, en quoi le droit du père de famille est-il violé ? Dès lors qu’il garde la liberté de choisir des maîtres catholiques, à la seule condition qu’ils soient laïques, s’il se prétend lésé par l’obligation de les prendre laïques plutôt que congréganistes ou ecclésiastiques séculiers, n’est-il pas évident qu’il ne s’agit plus en réalité d’assurer une éducation catholique à ses enfants, mais de mettre son droit paternel au service d’intérêts qui ne sont pas ceux de son enfant ?

J’irai même plus loin. Je nierai que le droit du père exige, pour s’exercer, le régime des écoles confessionnelles. Il s’exerce aussi bien, aussi pleinement quand l’organisation non confessionnelle prévaut. Les pères de famille catholiques, protestants, israélites, francs-maçons, sceptiques, positivistes, qui donnent leurs enfants à une le non confessionnelle, par exemple à un lycée de l’État, ne sacrifient, n’abdiquent aucune partie de leur droit paternel. Ils demandent aux maîtres d’enseigner à leurs enfants ce qu’ils savent, et quant à ce qu’ils croient, de s’abstenir de le leur inculquer ; ils se réservent à eux-mêmes la direction de l’éducation religieuse et morale.

En fait, je vois les défenseurs de la liberté du père de famille mettre en avant tour à tour suivant les circonstances deux conceptions bien distinctes. Pour sauver devant le Parlement les établissements congréganistes, on dit aux groupes de gauche : « Vous avez vos lycées, vos écoles sans Dieu. Laissez-nous nos écoles catholiques ». C’est le système de l’école confessionnelle.

Mais hors du Parlement, à chaque instant, on voit les catholiques contrôler l’enseignement qui se donne dans les écoles et les lycées, invoquer le principe de la neutralité scolaire, dénoncer les professeurs qui selon eux, ont inquiété la conscience des élèves pieux : on