aussi irreprésentable, aussi consubstantielle au moi que possible. C’est la conception du Deus interior, de l’objectivité interne.
Et la première vérité étant la conscience intellectuelle, la tentation est grande non seulement de la détacher de l’esprit en tant qu’éternelle, et de la lui opposer en quelque sorte, mais cette première vérité étant conscience, de la détacher sous forme de conscience. Comment n’attribuerait-on pas, disait Platon, la vie et la conscience à l’être ? Déjà l’on peut se demander si les lois en général ne subsistent pas en des sujets ou en un sujet. Cela n’est pas prouvé sans doute. Mais si l’on peut dire des êtres conscients qu’ils sont des lois internes, dire que les lois ont pour support des sujets, n’est-ce pas la proposition connexe ? Car de dire qu’elles n’ont d’autres sujets que ceux même auxquels elles s’appliquent, cela semble insuffisant, comme nous l’avons déjà observé, les êtres n’étant rien sans les lois qu’ils présupposent. Et, en somme, si un être assistait à tous nos actes, de telle sorte que sa conscience ne pût, pour des raisons quelconques et que l’on peut imaginer telles qu’on voudra, communiquer avec la nôtre, il pourrait cependant étudier les lois de nos actions, et les expliquer toutes en se passant d’âme et de conscience ; nos actes formant une série dont on pourrait interpréter différemment l’imprévisibilité, si l’on ne savait par des signes immédiats qu’ils se rattachent à des consciences. Il n’est pas impossible, par suite, que les lois dépendent d’un sujet, encore qu’on ne puisse en saisir directement les signes. Mais quand cela serait douteux pour les lois en général, ou ne se pourrait aussi aisément imaginer, dans l’ordre de la conscience, ne peut-on dire que la loi est conscience ? En nous la vérité première est conscience ; comment ne le serait-elle pas en dehors de notre pensée actuelle ? Il y a là un entraînement si naturel que des hommes d’esprit positif y ont cédé, en transformant en conscience centrale la loi qui préside au développement d’un pays. En devenant vérité universelle, le moralisme prend la forme d’un système naturel des choses. Le devoir devient la nécessité morale de Leibniz ; ma conscience morale devient le Dieu conscient intérieur.
Et cette conception du Dieu, conscience intérieure à nous-mêmes, peut presque se justifier par des analogies naturelles. Car si l’on admet que les êtres en eux-mêmes, comme nous avons dit, sont des consciences qui s’apparaissent sous la forme de l’étendue, il faut bien admettre un mode de communication de ces consciences elles-mêmes comme des mouvements. Il y a harmonie préétablie, dit Leibniz, mais