rent, la vérité réside en Dieu, de telle sorte que l’être vrai est
synonyme de Dieu ». Mais alors à Dieu appartient cette réalité dont
toutes les catégories ne sont que les simples descriptions ; si Dieu
ne le possède, rien ne le possède ; mais nier absolument toute réalité
est aussi impossible que de nier absolument toute vérité. L’argument
ontologique peut valoir contre un ens realissimum, contre une omnitudo realitatis ; mais l’existence du seul être réel ne peut être niée,
car la négation en serait contradictoire dans les termes. La seule
question est donc réduite à savoir si, de l’unique réalité, on peut
affirmer la catégorie de l’être ; or évidemment cela est aussi inutile
que légitime, tant la pleine profondeur de la réalité dans laquelle
toutes les catégories résident est exprimée d’une manière inadéquate
par cette catégorie, de toutes la plus simple et la plus abstraite.
IV
Il faut reconnaître que Hégel n’a jamais rien fait pour fonder, d’une manière explicite, le premier moment de la dialectique, que nulle justification n’est jamais fournie de l’idée de l’être : cette idée est simplement postulée, et toutes les conséquences qui en découlent, quelque rigoureux que soit le lien qui les y rattache, semblent, pour ainsi dire, suspendues en l’air, sans que nul raisonnement les rattache à la réalité. L’explication de cette particularité doit être cherchée, croyons-nous, à la fois dans l’état de la philosophie au temps où Hégel conçut son système, et dans le caractère propre de Hégel.
Le mode d’argumentation que je suppose avoir été l’arrière-pensée de Hégel consisterait à donner à chaque moment de la dialectique la forme d’un raisonnement transcendental : le fondement de la dialectique entière serait l’existence du monde de l’expérience, que nul sceptique ne peut mettre en doute. L’affirmation la plus nue dont ce monde de l’expérience pût être l’objet, impliquerait qu’il fût soumis à la catégorie de l’être, dont la légitimité nous aurait été accordée ; mais comme, avec le progrès de la dialectique, la catégorie de l’être développerait des contradictions qui conduiraient à de nouvelles catégories, la légitimité de ces catégories devrait donc aussi nous être accordée, en tant qu’elles s’appliquent à la réalité, puisqu’elles découlent de la légitimité de la catégorie de l’être. —